Althéo est tout, et rien à la fois. Il est partout mais introuvable. Ouvre un magasine, prend une page au hasard, tu auras sa tête parfaitement maquillée, parfaitement coiffée, qui te sourit, les yeux vides. Repose le magasine, lève la tête, ces mêmes yeux te fixent depuis la façade d'un bâtiment, un immense écran de publicité est érigé pour louer sa beauté, son génie, sa marque. Sur Youtube ? Il est là en train de chanter et danser, ou alors il t'explique comment te maquiller parfaitement pour n'importe quelle occasion. Sur Instagram, ses dernières photos de vacances amassent des millions de likes. Sur Twitter, la moindre de ses petites remarques font rire ou polémique. Et sur Tiktok, ses fans montent des vidéos à son effigie, chaque trait de son visage est admiré au ralenti, pas besoin de filtres avec Althéo, il est parfait. A la radio, il parle du dernier livre qu'il a lu en blaguant sur le fait que oui, il sait lire, et on félicite sa culture, sa façon de s'exprimer, le timbre de sa voix si apaisant et clair. A la télé, on s'amuse de son sens de l'humour, de sa répartie, d'à quel point il est beau, mignon, classe, stylé, magnifique, incroyable, Althéo. Et au cinéma, c'est sa gueule sur les affiches, c'est son beau sourire sur les bandes annonces, et c'est le film où il joue le protagoniste que tu es allé voir. Sur la cannette que tu as achetée pour te désaltérer pendant le film, c'est lui qui fait le placement de produits, c'est lui qui te dit à quel point tu vas te régaler en buvant cette boisson. Dans ta rue, c'est son salon de coiffure qui amasse le plus de touristes, dans ta salle de bain c'est les produits de maquillage et de soins de la peau avec son nom sur les emballages que tu utilises. Et dans tes rêves, il y aura ce même sourire, et surtout, ces mêmes yeux à l'étincelle factice.

Un miroir brisé. Une vie entière de malheurs. Althéo a tout réussi. Althéo a tout ce que tout le monde voudrait: une belle dégaine, un corps parfait, une personnalité agréable. Mais à l'intérieur, tout est vide. Althéo a le coeur brisé. Les paparazzis se frottent les mains: sa vie sentimentale est un désastre. Et puis, la peur. La peur de la solitude. Elle est là, elle le ronge. Althéo a peur qu'on lui tourne le dos, Althéo a peur qu'on le laisse alors il s'accroche, même si ça le fait souffrir. La peur d'être oublié. Althéo a peur de tout perdre, d'un coup, et en même temps il ne désire que la paix. Multitâche, car si on lui laisse le moindre instant seul avec ses pensées, il pourrait sauter du pont le plus proche. La première mauvaise décision, et il fonce tout droit dans le panneau. Il évite ses problèmes en se jetant dans les bras du premier venu en espérant qu'on le rattrape au vol. Les poignets aux lignes roses et les cheveux qui s'amassent au fond du lavabo, il pleure, il boit. La peur de l'abandon le détruit et Althéo a cette terrible manie, celle de faire n'importe quoi dès que quelque chose ne se passe pas comme prévu. Dans un rêve il souhaite devenir quelqu'un de bien, quelqu'un de stable, quelqu'un qui s'aime. Il rêve d'une descendance et d'un homme qui lui sourit, un homme qui l'aime au moins autant que lui l'aime. Il rêve des flashs et des micros qui s'éloignent. Dans un autre rêve il voit son corps disparaître doucement, ce n'est pas vraiment comme une mort mais c'est plus une disparition, une pause dans sa vie - dans un autre rêve il a enfin l'occasion de se reposer. Dans un rêve il a cette paix qu'il désire tant. Althéo veut que la célébrité le laisse tranquille, que sa famille le laisse tranquille, que l'amour le laisse tranquille. Althéo veut le silence et la paix. Mais pourra-t-il se supporter, une fois seul avec lui-même ?